Je suis impatiente d'entendre à nouveau quelqu'un discourir devant moi, pour me guider vers des horizons jusqu'alors par moi négligés.
Malheureusement, les 3 cours auxquels j'assiste ressemblent plutôt à des séminaires auxquels les élèves sont invités à participer activement. Mais, si l'on donne ici beaucoup la parole aux élèves, chaque professeur semble également conscient de l'importance de la reprise qui conclura chaque exposé, ce qui est plutôt rassurant.
1. Le passé nazi comme argument politique en BRD
Nous sommes seulement 8, dont 3 Français : les Allemands considèreraient-ils avoir déjà suffisamment entendu parler de cette période noire ? Ces discussions en groupe restreint permettront peut-être de comparer point de vue d'Allemands, point de vue de Français, ou de constater que cette distinction n'est pas judicieuse et n'a pas lieu d'être.
2. Cours de traduction de l'allemand vers le français
Entendre des Allemands buter sur les conjugaisons françaises ou certaines subtilités syntaxiques est une expérience intéressante. Leur niveau est très bon : certains maîtrisent parfaitement le passé simple de verbes complexes. Cela faisait longtemps que je ne m'étais pas interrogée sur la conjugaison du verbe "coudre". Notre professeur non plus, d'ailleurs : il me semble bien l'avoir entendu valider la forme "je cousus" proposée par l'un des étudiants...
Exemples de difficultés rencontrés :
- Justification du pronom "lui" dans :
C'est mon père qui m'a appelée, LUI qui ne s'intéresse généralement pas à ce que je fais de mes après-midi.
- choix du mot "vieux" ou de "vieil" en fonction de la lettre avec laquelle commence le mot dont l'adjectif est l'épithète : "un vieil homme", "un vieux hibou". Mais "un vieux hérisson" ou "un vieil hérisson" ?
- conjugaison du 3 ème groupe :
Une chaise repeindue ou repeintue ?
3. Cours sur le retour du phénomène religieux dans nos sociétés "post-sécularisées".
Le professeur se propose d'étudier un certain nombre de textes "canoniques" à propos du rapport entre religion et démocratie, religion et modernité, religion et vie publique.
Les élèves sourient à l'idée de lire Joseph Ratzinger en guise d'introduction, et demandent qu'une place plus importante soit accordée à l'Islam, à côté de la religion chrétienne ; le professeur obtempère. La bonne volonté du professeur est évidente, et l'ouverture d'esprit des étudiants soulignée par ceux-ci.
Ma voisine d'amphi, avec laquelle j'avais échangé quelques mots, est désappointée d'être venue de chez elle pour rien, et propose que nous passions un moment ensemble. J'aurais eu du mal à refuser poliment en français, mais je suis encore moins capable de faire preuve de tact en allemand, de sorte que je borborygme une réponse floue. Je parle d'aller acheter des gants, et elle assure pouvoir me conduire vers le meilleur marchand de la ville.
Seulement, celui-ci est à la fois très cher, et très intimidant : les gants se trouvent dans de jolies boîtes, qu'une vendeuse derrière son comptoir ouvre précautionneusement à votre demande. Je n'ai pas le courage d'affronter une telle vente sur mesure, et crains (encore une fois) d'avoir du mal à décliner dans les règles une proposition de sa part. J'entraîne la jeune Allemande vers un autre grand magasin, un peu plus loin (beaucoup trop loin), et l'écoute parler, parler, parler, à propos de vélos volés, de Venise, d'hivers à Munich, de cours ou de psychologie. Elle parle trop vite, trop bavarois, et trop tout court. J'en perds complètement mon allemand, multipliant les erreurs absurdes quand j'arrive à dire quelques mots. J'ai l'impression d'être un compagnon de Socrate, qui n'aurait qu'à acquiescer poliment à chaque question rhétorique (ce n'est faux faux - en effet - évidemment- à n'en pas douter - si tu les dis...); malheureusement, contrairement à Lycias ou Hippias, je suis toujours aussi (peu) instruite à la fin du dialogue qu'au début...
Je finis par parvenir à m'en débarrasser (après quasiment deux heures de bavardages ininterrompus), reviens dans une boutique déjà repérée, et m'équipe sérieusement pour l'hiver : gants + bonnet, pour la première fois depuis des années !
En rentrant, je découvre pour la première fois à quoi ressemble un repas à la Stiftung : il y a un choix impressionnant, pour végétariens ou non, légumes et viandes, crudités et poisson, fruits et boissons. Ce luxe m'éblouit.
J'échange ensuite quelques mots avec J., sympathique, souriant et patient, et m'aperçois que mon allemand est revenu : il semblerait donc bien que ma capacité à parler cette langue dépende de mon état d'énervement général !
Phrase du jour :
"Ich interessiere mich eher für die Fundamentalisten; aber wenn das Thema meines Referats "die Toleranz" sein soll, bin auch damit einverstanden!"
Vieil hérisson ou vieux hérisson ? Ben mince, la réponse n'est pas évidente. Sein alter Igel ist eigentlich einfacher. (VG)
RépondreSupprimerSurtout pour celui dont le français n'est pas la langue maternelle...!
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